Par ces temps de disettes ou l’Etat se décharge bien volontiers de sa mission de solidarité sociale, on découvre que certains bénévoles ne le sont pas tant que çà.
Tout le monde connait l’opération « pièces jaunes » renouvelée chaque mois de janvier et ceci depuis 1990.
Le principe est simple : dans les bureaux de postes, des petites boites en carton sont destinées à recueillir des petites pièces, dont par charité, les uns ou les autres décident de se débarrasser.
Les enfants sont incités à casser leur tirelire pour améliorer le sort d’autres enfants soignés dans des hôpitaux.
C’est le lobby de Bernadette Chirac, faisant un couple improbable avec David Douillet, l’ex judoka, lequel vient de passer la main à Christian Karembeu, l’ex footeux. lien
Un train est affrété, et parcourt la campagne pour récolter les dons.
Des millions de tirelires sont placées à La Poste, dans les boulangeries, et dans la presse enfantine, dont « Picsou Magazine »…
Jusque là, tout va bien.
La plus jolie récolte s’est faite au moment du passage à l’euro, puisqu’en 2002, ce ne sont pas moins de 15 millions d’euros qui ont été récupérés.
Depuis, les récoltes baissent régulièrement :
2003, ce n’était plus que la moitié, 2004 la récolte est tombée à 6 millions d’euros, 2005 à peine 5 millions, et 2006 un peu plus de 4 millions, en 2007, surprise, ce sont 10,5 millions d’euros qui ont été récoltés, mais la chute reprend en 2009 seulement 4,1 millions d’euros, celle de 2010 a juste passé le cap des 3 millions. lien
D’où vient ce désamour?
C’est un article paru le 27 avril 2006 dans « l’Express » qui, en premier chef, a jeté un froid.
Signé par Elodie Sentenac et François Vignal, sous le titre « zones grises des pièces jaunes », il jette un discrédit argumenté sur l’opération, et fait apparaitre des contradictions, voire des mensonges.
Sur la toile, on a affirmait qu’il s’agissait d’un hoax, et pourtant… (lien)
Alors que la Fondation Hôpitaux de Paris-Hôpitaux de France affirme que seulement 25 personnes ont été logées et nourries, les journalistes ont eu accès à un fax qui dément cette affirmation.
A Montélimar, ce sont 127 personnes qui ont fait bombance dans un hôtel dont la carte affiche des menus à 36 €.
Un chèque de 2700 € a été signé pour régler le tout, mais, affirme Bernadette, TF1 rembourse l’hébergement des artistes.
La chaine a démenti assurant qu’ils ne prenaient pas en charge les frais des chanteurs. lien
En fait 48 personnes ont été logées dans 29 chambres, et 13 villas individuelles. lien
Pour faire court, en 2006, pour 4,3 millions d’euros engrangés, 1,43 millions d’euros ont été dépensés, soit en communication, soit en frais de fonctionnement, ce qui représente plus de 30% de la récolte.
En 2007, 2,9 millions d’euros ont été consacrés en « frais d’activité ». lien
Il faut ajouter à ce tableau pas trop réjouissant que les communes qui reçoivent cette « caravane de la charité » doivent débourser aussi, addition qui peut dépasser les 100 000 €, payés par les habitants.
C’est ce qu’à témoigné Marcel Mangnon, conseiller municipal de Montélimar, le 8 mars 2006 affirmant que la ville avait déboursé 80 000 € à l’occasion. lien
Le « Canard Enchainé », qui prend beaucoup de précautions avant de publier, à confirmé ces dérapages dans son édition du 22 février 2006.
A l’occasion de ce passage dans cette ville de la Drôme, les dépenses ont donc été plus importantes que la récolte des pièces.
A Caen la ville a du débourser 36 000 euros pour la location de la salle de spectacle et Nice a décroché le pompon avec 162 000 euros, payés par les Niçois bien sur. lien
En 2010 une chanson a été crée pour l’occasion (enfant phare du monde) et même si on nous assure que créateurs et interprètes ont décidé de reverser les bénéfices de la vente du cd, on apprend que le titre peut être téléchargé pour 0,99 € dont seulement 0,20€ seront reversés à la fondation. lien
Ou vont donc les 0,79 € restant ?
On essaye de comprendre ?
Du coup, la Cour des Comptes a décidé d’enquêter afin de vérifier notamment les frais de fonctionnement de la fondation. lien
Le tableau s’assombrit encore un peu plus, puisque, d’après « contribuables.org » « Patrice Corbin, trésorier de la fondation des Hôpitaux de Paris a été poursuivi par l’assistance Publique-Hôpitaux de Paris, son ancien employeur, pour occupation non-légale d’un de ses logements, dans un quartier chic de la capitale ». lien
Ce qui fait mauvais genre puisque ce même Patrice Corbin est également magistrat à la Cour des Comptes.
Mais Bernadette ne s’inquiète pas.
Et puis, pour la remercier, le chef de l’état lui a remis les insignes de chevalier de la légion d’honneur, le 18 mars 2009. lien
Des pièces jaunes au téléthon, il n’y a qu’un pas facile à franchir.
France Télévision, qui est son partenaire, facture quand même 1,5 millions d’euros pour les 30 heures d’émission. lien
Ce que l’on sait moins, c’est que l’argent versé aux labos pour la recherche sur les maladies génétiques, sert aussi, sans que les donateurs le sachent vraiment, à la recherche sur les OGM.
En effet, dans le laboratoire Limagrain, (Chappes, Puy de Dôme) par exemple, j’ai eu la confirmation que dans ce laboratoire, qui recevait une partie de la manne du téléthon, on faisait aussi bien de la recherche sur les OGM que sur les maladies génétiques.
Sophie Benthouar jointe au téléphone a confirmé que son laboratoire travaillait avec Bertrand Mérot, de MERISTEM, lequel utilisait des semences modifiées génétiquement pour la fabrication d’un médicament destiné à lutter contre la mucoviscidose. lien
Pierre Bergé est allé encore plus loin en affirmant que « les 100 millions pour le Téléthon ne sert à rien » après avoir déclaré auparavant que « le Téléthon parasitait la générosité des français en montrant des enfants myopathes, en exhibant le malheur des enfants ». lien
Mais revenons à nos associations caritatives.
Le pompon a été décroché par l’AIRMA (Association Internationale pour la Recherche sur la Maladie d’Alzheimer).
Depuis sa création en 2003, sur les 7,5 millions d’euros récoltés, elle n’a reversé aux chercheurs que 510 000 €, soit 6,8% du total.
L’association ayant refusé de publier ses comptes 2009, ses dirigeants ont été mis en examen pour escroquerie en bande organisée. lien
L’observatoire des subventions a fait l’inventaire des dérapages.
Sur ce tableau, 30 associations faisant appel à la générosité publique sont passées au crible.
Cataloguées entre « vertueuses » à « flambeuses » en passant par « peut mieux faire », on découvre comme « mauvais élève » l’association de Danielle Mitterrand (France Liberté) qui a consacré 41% du montant des subventions aux frais de fonctionnement et n’a consacré que 87 000 € à la défense des droits de l’homme en 2007.
Une autre, Intervida utilise moins de 50% de ses collectes aux buts qu’elle s’est fixée.
Les « Petits Frères des Pauvres » ne le sont pas tant que çà : ils ont encaissé 42 millions d’euros et n’en ont utilisé que les 2/3 pour aider les pauvres. A leur décharge, ils ont à gérer des centres de vacances lourds à entretenir.
Chez les « mauvais élèves » on ne peut pas passer sous silence l’ARDMLA (association de recherche sur la dégénérescence maculaire) qui consacre 80% de son budget aux frais de collecte.
La Fédération Française de Cardiologie ne consacre que la moitié de son budget aux missions qu’elle s’est fixée.
Les plus vertueux sont Les Restos du Cœur, ATD Quart Monde, Action contre la Faim, Perce Neige, Médecins sans frontières, l’Ordre de Malte, l’ARC, (malgré les frasques de Crozemarie) UNICEF France et la Croix Rouge française dont les frais de fonctionnement voisinent les 5%, et dont la part consacrée à leurs œuvres dépassent les ¾ de leur budget.
Au risque de gâcher ce début d’année, et pour la bonne bouche, il faudrait compléter la liste par d’autres dérapages : le livre « sous nos yeux » sur la visite d’Emmanuelle Béart en Mauritanie s’est vendu 30 euros, dont un seul euro par livre à été reversé par l’éditeur Gallimard pour les œuvres de l’Unicef.
la « fondation pour l’enfance » d’Anne Aymone Giscard d’Estaing à reversé seulement 58 % aux bonnes œuvres de l’association du résultat du repas luxueux dont le couvert est facturé 1200 € par convive). lien
« Donnez, dooonnez, donnez moi » chantait un certain Macias…
Il serait temps que les français choisissent un peu mieux la destination de leur générosité, car comme dit mon vieil ami africain :
«Premier gaou n’est pas gaou, c’est deuxième gaou qui est niata »
Image: Montreal Ultimate